École publique de Saint-Didier-sous-Riverie |
La lettre de l'éducation |
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Nathalie Guibert |
Un
village de 1000 habitants dans la région lyonnaise. Deux écoles, l'une
privée, l'autre publique. Et dans celle-ci, un directeur qui «
cherche, sans réponse toute faite, à faire grandir les enfants ». Rémi
Castérès dirige l'école de Saint-Didier-sous-Riverie, sans trop se préoccuper
de sa soeur privée, convaincu de tenir, pour ses 70 élèves, les trois
bouts d'une réussite collective: une pédagogie individualisée sur la
base de contrats ; un fonctionnement en cycles, assuré par les trois
enseignants de l'école, amenés du coup à travailler autrement; des
relations « professionnelles » avec les parents. La hiérarchie
ne s'y est pas trompée, qui a commencé par nommer Rémi Castérès maître
formateur il y a quatre ans, avant de décider, tout récemment, de
transformer l'établissement en école d'application dès la rentrée
2000. Les collèges avoisinants non plus, qui jugent les élèves de Saint-Didier
plus désireux d'apprendre que leurs congénères. L'aide
aux élèves en difficulté est apportée, dès la maternelle, sur la base
d'un contrat personnel élaboré avec les intéressés, leurs parents et
les enseignants. Avant signature, un brouillon est donné à l'élève,
qui peut l'amender. But du jeu : éviter les situations
conflictuelles et ouvrir une perspective si un problème surgit. Les
objectifs à atteindre sont à la fois simples et précis. En petite
section cela donne par exemple pour un enfant ayant des difficultés à s'intégrer
au groupe : « Quand j'apporte un jouet de la maison, je le montre puis
je le range. » Plus tard, au gré des lacunes constatées :
« Si je n'écoute pas, à n'importe quel moment le maître peut
m'interroger sur ce qu'il vient de dire » ; ou: « Tant que je
n'arrive pas à résoudre un problème, je ne bavarde pas » ; ou
encore: « A la maison, je dois lire tous les jours dix minutes devant
ma mère, qui va noter les mots que je n'arrive pas à lire. »
L'efficacité du dispositif se mesure de façon pragmatique. « Les
problèmes sont réglés dans neuf cas sur dix », affirme Rémi Castérès. Le
fonctionnement en cycles, poursuit-il, a transformé les pratiques
enseignantes: « Les maîtres ne sont pas repliés sur leur
classe. Chaque cycle a une personnalité forte et donne une cohérence aux
apprentissages. On sait très bien où en sont les enfants. » Exemple
de ce fonctionnement : entre 8 h 30 et 10 heures, pendant
que les CP-CE1 travaillent en autonomie dans des ateliers, sous la
houlette de l'aide-éducateur, leur maître ne s'occupe que de la grande
section de maternelle. Dans chaque atelier, un élève de CEI sert alors
de « personne-ressource » pour les autres. Autre exemple, pendant
la sieste de ses élèves, le maître de maternelle intervient en cycle 2.
« Nous fonctionnons ainsi par groupes sans tenir compte des effectifs. »
Le dispositif semble donner satisfaction, mais il accroît la charge de
travail : Rémi Castérès ne dirait pas non à la présence d'un
deuxième maître en cycle 2. L'école s'apprêtant à ouvrir une
quatrième classe, il réfléchit par ailleurs aux moyens de faire
travailler quatre maîtres pour trois classes. Quant
aux parents, Rémi Castérès veut « les faire réfléchir sur l'école
». Les tâches sont clairement réparties : aux parents le périscolaire
(tout le périscolaire, l'école refusant « d'y mettre le nez »), aux
enseignants la pédagogie. Les familles collectent des fonds grâce à une
association - bien-nommée le SOU - devenue au fil du temps la plus
importante de la commune; elles se réunissent quand elles le souhaitent
dans la salle polyvalente de l'école; prennent totalement en charge les
sorties... Les relations individuelles sont quant à elles strictement
organisées, les règles du jeu étant fixées dans le numéro de rentrée
du journal de l'école : on ne voit les familles que sur rendez-vous
(chaque famille est vue plusieurs fois dans l'année et chaque enseignant
voit toutes « ses » familles). Les enseignants y prennent des
notes, afin de nourrir le dossier qui suivra l'élève. Rémi Castérès
refuse de parler d'un enfant en dehors de l'école, même avec les voisins
de son hameau : « On prend la voiture et on va à l'école.
Il s'agit d'instaurer un geste professionnel. C'est par lui que l'on
enclenche un cercle vertueux. » La réflexion engagée avec les
parents, qui part toujours d'un problème scolaire, peut aller loin: l'école
travaille avec le psychanalyste Jacques Lévine, « médiateur neutre
et bienveillant » qui vient une fois tous les deux mois dénouer les
situations les plus complexes. L'investissement est lourd et mangeur de temps ; sa mise en place a été très progressive ; et la prise en charge « éducative » ne s'est pas imposée sans heurts. «J'ai dû changer d'équipe », rappelle Rémi Castérès. Aujourd'hui, l'Atsem de Saint-Didier-sous-Riverie se plonge dans La Pédagogie différenciée de Perrenoud. Un ouvrage que M. le Directeur n'a jamais lu. |
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