École publique de Saint-Didier-sous-Riverie

Sécurité

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Cette page a été écrite pour répondre à des questions d'une collègue concernant les ceintures de comportement et la sécurité.

Voici les questions :

« J'ai mis en place des ceintures de comportement. Or, je suis confrontée à une question lourde concernant le droit de se déplacer librement dans l'école et de rester sans ma présence à deux ou trois en classe pendant la récréation : quelle est la part de ma responsabilité en cas d'accident (notre école est sur deux étages et ma classe est au deuxième). Comment gérez-vous cela dans votre école ? Les parents sont-ils conscients du problème ? Quelles solutions avez-vous ? »

 

 

 

Un écolier de Nishinomiya fabrique sa guitare. Toutes les guitares sont différentes et on prend le risque de se taper sur les doigts.

Voici mes réponses.

Réponses rapides :

1. Quand tu laisses des élèves en classe pendant la récréation, ta responsabilité en cas d’accident est totale.

2. Comment nous gérons cela dans notre école ? Nous prenons ce risque.

3. Les parents sont-ils conscients du problème ? Oui et non. Comme il n’y a jamais eu d’incident lié à cela, je suppose qu’ils ne s'en préoccupent pas. D’autre part, comme ils doivent signer une autorisation pour que leur enfant puisse sortir de l’école pendant les heures de classe, s’il est ceinture noire de comportement, ils se posent forcément la question.

Réponses plus élaborées quoique encore bien incomplètes :

1. Cela fait plus de quinze ans que j’utilise les ceintures de comportement, avec des droits afférents réels, pour mes élèves de Saint-Genis-Laval (banlieue de Lyon) et de Saint-Didier-sous-Riverie. Non seulement il n’y a jamais eu d’accident lié aux droits donnés par ces ceintures, mais il n’y a jamais eu le moindre incident.

2. La sécurité n’est pas assurée par des murs et les barrières, elle est dans les têtes. J’ai accueilli un élève qui avait été exclu de deux écoles pour violences et pour fugues. En ce qui concerne ce dernier point, je lui ai dit : « Je sais qu’il t’est arrivé de te mettre très en colère et de ne plus te contrôler. Si tu sens que cela va t’arriver à nouveau, je te demande de quitter discrètement la classe et de sortir. Tu verras, quand on est seul, on se calme. Je ne veux pas que tu reviennes avant d’être calmé et prêt à nouveau à travailler avec les autres. » Au lieu de surveiller particulièrement cet enfant qui se sauvait, je l’ai autorisé à sortir. Du coup, il n’avait plus de raisons de se sauver, puisque personne ne lui courrait après… Il a quitté la classe trois ou quatre fois, discrètement comme je lui avais demandé. Je ne crois pas qu’il soit allé jamais bien loin — la cour ou le jardin. Il revenait vingt ou trente minutes plus tard, avec un petit sourire. Ça s’est arrêté sans que nous en reparlions.

Il ne s’agit pas d’éliminer tous les dangers — ce que l’on fait normalement avec des bébés — il s’agit de faire prendre conscience aux élèves des risques existants et de leur apprendre à les gérer. Il est plus dangereux de laisser croire à des enfants qu’il n’y a pas de risques que de leur apprendre à faire attention.

En Angleterre, la première école que j’ai visitée, au début des années 70, donnait sur une pelouse sans barrières. Pendant la récréation, des élèves s’occupaient des lapins pendant que les enseignants buvaient le thé dans la salle des professeurs. Au Japon, l’an dernier, j’ai visité une école de 900 élèves sans aucune surveillance de l’immense cour de récréation (avec des équipements divers, des monocycles…), avec des élèves qui entraient et sortaient apparemment sans surveillance entre les locaux et la cour. Après la récréation, les élèves qui se dirigeaient, seuls, vers l’infirmerie me montraient fièrement leurs genoux écorchés. Voir ce qui se passe ailleurs permet de relativiser notre manière hexagonale de considérer ces questions.

Je n’ai pas envie d’être angoissé : je veille à ne prendre que des risques minimes. Il est difficile pour mes élèves d’être ceinture bleue de comportement et plus encore, ceinture noire. Là, il s’agit pour moi d’être observateur et de ne rien laisser passer. Il n’est pas question d’admettre un : « Bon, ça va pour cette fois, mais fais attention ! » En matière de sécurité, contrairement aux jeux vidéo, on n’a pas droit à plusieurs chances.

À la veille des vacances de février, période difficile entre toutes, il n’y a plus dans ma classe aucune ceinture noire de comportement. À d’autres moments, il y en a eu cinq. Ce qui est important, c'est le désir de grandir, d'être responsable que cela crée chez les enfants.

Il est important pour toi de savoir si tu évalues de façon réaliste la situation ou si tu te laisses emporter par tes désirs — cela arrive à tous. Le “Quoi de neuf ?”, le Conseil de coopérative se passent-ils dans le calme ou es-tu obligée d’intervenir fréquemment ? Fais appel à un observateur extérieur : que se passe-t-il dans ta classe quand des élèves s’y trouvent seuls ?

3. Nos parents d’élèves sont fiers quand leur enfant est ceinture noire de comportement. J’ai perçu cela en voyant des élèves, munis de leur toute nouvelle ceinture noire, se rendre à l’épicerie pendant la récréation pour y acheter des bonbons qu’ils ont ensuite distribués à leur camarades, pratique que je n’ai pas encouragée…

4. Ta question m’amène à des considérations plus personnelles. On vient de commémorer le soixantième anniversaire de la libération d’Auschwitz. On nous assure que plus jamais ça. Mais comment serait-il possible de l’empêcher avec des “citoyens” qui ne voudraient plus prendre le moindre risque ?

Mon père était résistant. Pour moi, adolescent, cela ne fut pas facile : qu’aurai-je fait à sa place ? Je sais que je n’aurai jamais la réponse. Je ne saurai jamais quels risques j’aurais pris à l’époque. Mais je sais que si je n’avais pas le courage minime de prendre quelques risques aujourd’hui, je n’en aurai certainement pas eu davantage à l’époque.

Rémi Castérès


À Nishinomiya (Japon) : un tout petit coin de l'immense cour de récréation
 

 


Discussion


En réalité, je pense exactement comme toi, mais je me suis confrontée aux réticences de mes collègues (et en particulier l'une d'entre elles revenant d'un stage de l'IUFM réservé aux débutants, au cours duquel il y avait eu un cours de législation). Je pense toutefois réussir à les convertir progressivement en leur expliquant l'intérêt de ce principe des ceintures de comportement et en leur montrant comment cela fonctionne dans d'autres écoles (la vôtre par exemple).

Hélène

(14 février 2005)


 

Je suis responsable d'un Centre de Loisirs Primaire et j'utilise aussi le système des ceintures de comportement dans ma structure.

C'est un excellent outil de gestion des individualités mais surtout et aussi de co-éducation. Il favorise le développement personnel de chaque enfant, ceci en faisant prendre conscience des potentiels de chacun (curiosité, esprit critique, créatif, ...) et en accompagnant l'enfant dans sa progression vers l'autonomie (auto-administration, prise d'initiatives, de responsabilités et de décisions). L'enfant joue plus facilement le pluriel et la co-éducation avec ce système (respect, ouverture d'esprit, tolérance, entraide, esprit d'équipe, confiance, partage, écoute, participation à l'organisation et la gestion des temps de loisirs, etc.)

Cependant, il faut poser certains garde-fou à ce système :

- ne pas donner à un enfant des responsabilités qu'il ne pourrait assumer ;

- ne pas jouer la "carotte" avec le système, pas de chantage ;

- ne pas faire du système une contrainte (la ceinture blanche est tout aussi respectable que la jaune ou la orange). Chaque enfant à un rythme qui lui est propre (respect du développement personnel de chaque enfant) ;

- ne pas utiliser le système des ceintures pour parler des enfants (ce ne sont pas des choses) ;

- un enfant reste un enfant qui doit vivre sa vie d'enfant (c'est aussi un adulte en devenir mais laissons le grandir à son propre rythme).

Max W.

(26 février 2006)

 

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dimanche 26 février 2006