École publique de Saint-Didier-sous-Riverie

Comportement

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D'autres réparent une trottinette.

Je vise un double objectif en ce qui concerne le comportement de mes élèves :

• leur développement à long terme ;

• la facilitation de mon travail de maître.

Je ne veux pas faire la classe aux élèves, je veux faire la classe avec les élèves. Ces derniers deviennent ainsi co-dirigeants de la classe. Pour que cela soit effectif, il faut qu'ils acquièrent un maximum de responsabilités et de droits.

J'ai pris en compte plusieurs aspects :

1. Tous les enfants n'en sont pas au même stade dans leur comportement.

2. Pourtant, plus ils ont d'autonomie, plus ça me facilite le travail et le rend plus agréable.

3. Comme dans les autres disciplines, le fait d'évaluer propose un chemin pour grandir. Les enfants savent ce qui est attendu d'eux et où ils en sont.

Donc, j'ai choisi :

1. Que les enfants n'auront pas tous les mêmes droits. Cela choque beaucoup d'enseignants (l'Éducation Nationale est la fille aînée du communisme), mais c'est conforme à ce qui existe dans la société : tout le monde n'a heureusement pas le permis de conduire, le permis de chasser, le permis de piloter un Airbus... Quand on donne les mêmes droits à tous (ce qui est le cas général), on est obligé de niveler par le bas, sinon on prendrait des risques énormes. Des élèves de ma classe ont le droit de sortir de l'école pendant le temps de classe (et cela depuis plus de dix ans, en banlieue comme à la campagne, sans le moindre incident). Donc, tous les enfants n'ont pas les mêmes droits mais ils peuvent tous les acquérir.

2. Que l'évaluation du comportement se fera selon deux grands axes de progrès :

• le respect de soi-même et des autres ;

• la capacité à organiser et à s'organiser.

3. Qu'à partir des réussites dans ces domaines, les enfants obtiendront des droits (énoncés dans la dernière ligne du tableau ci-dessous).

Il m'a fallu veiller à la cohérence entre les épreuves et les droits qu'elles donnent, ce qui m'a conduit à enlever les ceintures jaune, verte et marron (utilisées pour les autres évaluations) - sinon, certains droits auraient eu un côté artificiel. Voici donc mes ceintures de comportement :

Des élèves du cycle 3 désherbent la cour (à leur demande).

 

 

BLANCHE

ORANGE

BLEUE

NOIRE

RESPECTER AUTRUI, SE RESPECTER

Je connais le règlement de la classe.

J'ai rangé le matériel collectif et j'en ai pris soin.

J'ai respecté les règles de vie de la classe et de l'école, même en l'absence du maître / de la maîtresse.

J'ai circulé en toute sécurité à l'extérieur de l'école.

S'ORGANISER, ÊTRE AUTONOME

J'ai rangé correctement mes affaires. Mes fiches sont classées.

C'est dans la corbeille que j'ai jeté les papiers.

J'ai terminé mon travail en temps voulu.

Le travail que j'ai présenté a été sérieux et soigné.

Mes classeurs et mes cahiers sont bien tenus et je peux en être fier (fière).

MES DROITS

Je peux circuler dans la classe et utiliser librement le matériel collectif.

Je peux utiliser sans le maître la salle polyvalente ou le bureau du directeur quand ils sont libres.

Je peux circuler librement dans l'école, rester en classe pendant les récréations.

Sous réserve de l'autorisation de mes parents, je peux me rendre à la poste, à la mairie, chez les commerçants...

 

L'évaluation du comportement est faite par le maître. Elle est fondée sur une observation dans la durée, par périodes de deux semaines. Pratiquement, seuls les comportements déviants sont notés, parce qu'ils sont l'exception.

Les élèves peuvent contester, a posteriori, mes observations. En général, ils me demandent de leur signaler à l'avenir les problèmes quand ils surviendront, par exemple : "Dis-moi quand je ne respecte pas les règles de vie de la classe ou de l'école." Si un problème survient à nouveau, je fais part à l'enfant de mon observation et lui demande s'il l'accepte. Ça ne lui fera pas réussir sa ceinture de comportement dans la période à venir mais ça lui permettra de prendre conscience du problème, donc de devenir capable, plus tard, d'y remédier.

Pour me souvenir qu'un élève m'a demandé de lui signaler un problème, je coche la case concernée au surligneur sur ma grille d'observations.

Il y a une différence entre les ceintures de comportement et les autres : il est possible, et c'est même assez fréquent, de perdre des ceintures de comportement.

Comme toutes les évaluations, en effet, les ceintures ne font que montrer qu'un élève a réussi, à un moment précis, dans des conditions particulières, une épreuve donnée. Ça ne garantit pas, par exemple, qu'il sait multiplier des nombres entiers ; c'est seulement la preuve qu'il a été capable de cette performance. Je ne vais pas lui faire calculer des multiplications, semaine après semaine, pour vérifier s'il en est toujours capable.

Par contre, il est indispensable de tenir compte des fluctuations du comportement des enfants. Selon l'état de fatigue, d'excitation, selon les événements familiaux, le comportement des enfants varie. C'est le fait même de noter ces changements, ce qui va, ce qui ne va pas, qui permettra à l'enfant d'en prendre conscience et de stabiliser sa conduite. C'est aussi, pour le maître, la garantie que des enfants n'ont pas des droits qu'ils ne seraient pas capables d'assumer.

Rémi Castérès

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Et la sécurité ?

 

 


Discussion


Nous avons une monnaie commune et je rencontre cette année une petite difficulté : tous les quinze jours, le vendredi après les ateliers (et le paiement du plan de travail individuel) nous organisons un marché chez mon collègue Jean René Laval et pour le faire vivre, les élèves peuvent bien sûr vendre des petits objets (sans valeur).

Un de mes élèves de cm2 "s'enrichit" non pas par son travail (qui progresse énormément malgré tout, surtout en maths) mais grâce à toutes les petites babioles que sa famille lui récupère (cadeaux de vente par correspondance notamment !) et lors du dernier paiement du plan de travail, il a refusé qu'on lui paie ses 15 ou 20 costis vu qu'il en avait gagné plus de 150 au dernier marché et qu'il avait encore plein de choses à vendre qui lui rapporteraient bien plus... Idem pour les amendes : il me les paie gracieusement en grosses coupures en me disant : "vous pouvez gardez la monnaie !" Heureusement, il reste respectueux des règles de vie de la classe et semble même malheureux quand on lui met des amendes ou des avertissements mais la question de l'avenir me travaille ! Que faut-il faire ? un impôt sur les grandes fortunes ? faire payer le droit de vendre au marché, son emplacement ? car j'ai peur que cette capitalisation ne pervertisse le bon fonctionnement de notre école !!!

Voilà, qu'en pensez-vous ? Avez-vous rencontré ce problème ?

Isabelle R.

Aujargues (Gard)

(1 janvier 2004)


Nous n’avons jamais rencontré de problème avec la monnaie interne parce que nous n’en avons pas. Non que je sois contre la société libérale, bien au contraire (le vingtième siècle a montré qu’on ne peut guère espérer mieux qu’une société capitaliste améliorée), mais pour une raison théorique. La monnaie, que ce soit l’euro ou celle introduite dans les groupements "alternatifs", a toujours pour fonction d’échanger facilement des marchandises et des services. Selon Karl Marx, une marchandise a deux valeurs : une valeur d’usage (ce qui est produit doit être utile à d’autres) et une valeur marchande (il s’agit de la quantité de travail incorporée dans la marchandise, ce qui équivaut au temps passé à la produire multiplié par la qualification du travail). À l’école, il y a bien un temps passé par les élèves à leur travail ; mais ils ne produisent aucune marchandise. Aucun échange marchand n’étant donc possible, il me semble que la monnaie est inutile — ce qui n’exclut pas d’autres types d’échanges, comme les marchés des connaissances.

Ce qui se produit avec votre élève de CM2, c’est une interférence entre la valeur de choses qui n’ont pas de valeur marchande et la valeur de choses qui en ont une, même faible. J’ai déjà entendu parler de dysfonctionnements du même ordre dans d’autres classes qui utilisent une monnaie interne. À mon avis, il n'y a pas de solution parce qu'ils proviennent d'une contradiction interne au dispositif.

R.C.

Je voulais te poser une autre petite question : sans monnaie de classe, pas d'amende, alors comment réglez-vous les petits problèmes de discipline ?

Isabelle R.

(7 janvier 2004)


Effectivement, il n'y a pas d'amendes. En gros, la discipline est gérée par les ceintures de comportement.

En détail, quand, par exemple, un élève dérange dans ma classe, je l'avertis. S'il recommence, je l'isole sur un tabouret (actuellement près d'une bibliothèque). En général, au bout d'une à dix minutes, cet enfant m'appelle et demande à retourner à sa place « pour [travail en cours], sans [cause du dérangement]. » Cela arrive une à deux fois par semaine.

Si l'élève ne m'appelle pas, ou s'il ne précise pas la raison pour laquelle il souhaite retourner à sa place, je le laisse là jusqu'à l'heure de la récréation ou de la sortie. Cela arrive environ une fois par trimestre. L'élève isolé assiste de cette place à ce qui se passe dans la classe, mais il ne peut pas intervenir ; il peut aussi prendre un livre de bibliothèque.

Au cycle 2, les élèves qui ne respectent pas un point du règlement sont isolés pendant une durée de trois minutes. C'est assez fréquent.

Les sanctions sont donc constituées par des privations de travail.

Pour que cela fonctionne, il faut bien sûr une alliance entre les enseignants et les élèves, dans un but de croissance.

R.C.

Bonjour Rémi et bravo pour ton site qui m'a ouvert les yeux sur un mode d'enseignement que j'avais un peu oublié.

Depuis deux ans, je travaille à mi-temps en CM1 et j'ai mis à profit ce temps libre pour explorer d'autres façons de faire la classe plus en adéquation avec ma vision de l'enseignement. Or, depuis mes débuts, il y a sept ans, j'avais plutôt tendance à glisser lentement mais sûrement vers une pédagogie de plus en plus frontale et sans saveur, comme si ma propre expérience d'élève avait envahi ma pédagogie. Alors, cette année, j'ai décidé de réagir et grâce à Internet, j'ai découvert beaucoup d'autres façons de faire et, entre autres, la tienne, et j'ai donc très vite mis en place des ceintures de comportement – et c'est à ce sujet que j'ai une petite question –, une pédagogie du débat (avec un "Quoi de neuf ?" et un Conseil de coopérative), un plan de travail individuel hebdomadaire, etc.

Or, je suis confrontée à une question lourde concernant le droit de se déplacer librement dans l'école et de rester sans ma présence à deux ou trois en classe pendant la récréation : quelle est la part de ma responsabilité en cas d'accident (notre école est sur deux étages et ma classe est au deuxième). Comment gérez-vous cela dans votre école ? Les parents sont-ils conscients du problème ? Quelles solutions avez-vous ?

Hélène

(11 février 2005)


Ta "petite" question a tant d'importance que je préfère consacrer une nouvelle page pour aborder cette question de la sécurité.

R.C.

J'aurais besoin de ton avis. Je t'expose brièvement les faits. Je suis éducatrice dans une M.E.C.S. sur un groupe d'enfants de 7 à 11 ans. Il se pratique sur ce groupe et ce depuis 20 ans, une réunion d'enfants une fois par semaine où ce dernier est sanctionné par son comportement jusqu'à la semaine d'après. Voila le principe :

– couleur verte : tout va bien ou, il a droit à toutes ses veillées

– couleur bleue : ça va aussi

– couleur orange : plus rien ne va, il n'a plus droit à la télé du vendredi soir, du jeu PlayStation, etc.

– couleur rouge : ça ne va pas du tout, il n'a droit à rien et doit se coucher après le repas et s'il y a activité vélo le mercredi il en est puni également.

Tout ce système me dérange pour plusieurs raisons et notamment parce qu'elle contient une certaine violence.

Il est difficile pour moi, nouvelle arrivante, de bousculer le système et pourtant il me semble qu'avec le système de ceinture comme tu le conçois, nous aurions plus de résultats.

Que penses-tu de leur manière de travailler ? Puis-je mettre en application, même s'il n'y a pas ce côté pédagogique, tes évaluations ? De quelle manière ?

Claudine

(7 aout 2006)

C’est une bonne chose que tu aies repéré la violence de ce système.

1. Dans ma classe, les élèves démarrent l’année scolaire sans ceinture de comportement. Ils ont les droits minimums, ceux qui sont communément accordés dans toutes les classes. S’ils respectent des choses précises, ils peuvent obtenir de nouveaux droits, liés à ces compétences.
Ils savent ce qu’ils doivent faire pour progresser. Ils peuvent obtenir de l’aide.

2. Dans ce que tu décris, il semble que les enfants aient droit à tout au départ et qu’ils ne peuvent que perdre – ou regagner, mais sans progresser au-dessus du niveau initial. Il s’agit donc d’un système de sanctions. Ce qui est lié à la couleur rouge montre qu’il s’agit de briser l’individu.

3. Le vélo, les relations sociales, ce sont des besoins fondamentaux pour les enfants ; surtout si ces enfants connaissent des difficultés familiales ou sociales. Qu’un enfant soit agité ou violent ne justifie pas qu’il ne soit pas autorisé, chaque jour, à prouver et à se prouver qu’il est capable de relations normales avec les autres, quitte à ce qu’il soit retiré du groupe momentanément ou pour la soirée en cas de troubles. Dans la page liée à celle-ci, sur la responsabilité, j’ai mentionné le cas d’un élève fugueur, qui d’ailleurs vivait comme ceux dont tu t’occupes dans un foyer pour enfants. Pendant les travaux en groupes, il était autorisé à se retirer et à travailler seul quand il sentait que ça n’irait plus — pour la durée de la séance, il n’avait plus le droit de revenir dans le groupe.

Maintenant, tu risques d’éprouver comme il est difficile de faire changer les choses. Comme tu es nouvelle, tu marches sur des œufs !

Si tu élabores des ceintures comportement adaptées au milieu dans lequel tu travailles, n’hésite pas à me les envoyer si tu souhaites que je les critique.

En te soutenant moralement dans ta démarche,

R.C.

 

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lundi 07 août 2006