École publique de Saint-Didier-sous-Riverie

Correspondance
scolaire au cycle 3

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La correspondance scolaire motive les enfants pour écrire. Elle permet une différenciation facile sans qu'il y ait d'échec : tous les élèves sont capables de produire au moins une lettre minimale. Elle conduit les enfants à se relire et/ou à faire vérifier leur texte par le maître, par les parents, par d'autres enfants, ce qui n'est certainement pas une habitude spontanée.

Quand on ajoute à cela l'échange scolaire, c'est-à-dire que les enfants sont accueillis dans la famille de leur correspondant, on introduit une charge émotionnelle très forte qui fait que cette correspondance restera un moment inoubliable.

Ce que je veux, c'est que l'écriture devienne pour les enfants associée au plaisir et à l'aventure.

Je vais détailler les étapes de la correspondance pendant l'année 2000-2001. Tous les ans, ça recommence - mais c'est chaque fois une aventure différente.


Le courrier vient d'être distribué (novembre 2002).

 

 

Trouver des correspondants

J'ai commencé à rechercher une classe avec laquelle échanger le 22 août 2000, en lisant les annonces sur Cartables et en y déposant la mienne.

La difficulté, cela a été de trouver un collègue qui accepte la pratique de l'échange scolaire. Après quelques mails, quelques coups de téléphone et quelques espoirs déçus (en Andorre, on voulait bien nous recevoir mais les élèves de la principauté n'ont pas le droit que quitter leur pays plus de 24 heures !) la classe a reçu le message suivant :

Bonjour,

Nous sommes les élèves de l'école publique de Créhen dans les Côtes d'Armor en Bretagne au bord de la mer.

Nous avons envie de correspondre avec vous.

Si vous voulez nous pouvons aller chez-vous 5 jours et vous pouvez venir chez-nous 5 jours. Nous vous ferons visiter plein de choses dans les Côtes d'Armor.

Nous sommes 15 : 2 filles et 13 garçons.

Si vous voulez, vous pourrez faire de la voile avec nous mais il faut que vous passiez un test à la piscine.

Nous sommes très gentils.

Les élèves de l'école de Créhen
Classe de CE2/CM

Mes élèves ont été

1. très contents ;

2. déçus qu'il y ait tant de garçons et si peu de filles (nous étions dans la situation inverse) ;

3. désireux d'aller immédiatement faire de la voile.

Mais il fallait d'abord choisir son correspondant.

Choisir son correspondant

Mes élèves ont demandé que, cette fois, ce soit les correspondants qui se présentent en premier.

Il faut bien réaliser que c'est très dur d'avoir à se présenter pour être choisi(e)... Et faire l'impasse est impossible ! Il y a d'emblée un gros travail à accomplir - non pour le maître, mais parce que c'est un enjeu de vie. En plus de l'intérêt scolaire que cela présente, cela amène l'enfant à se représenter le correspondant qu'il désire avoir et ce que ce correspondant imaginaire pourrait lui demander... Il imagine ce qu'un correspondant imaginaire pourrait penser de lui, c'est l'imaginaire de l'imaginaire, un élargissement de la conscience de soi-même et des autres. Voilà pourquoi je préfère cette solution à l'appariement décidé a priori par les enseignants.

L'instituteur de Créhen, Bernard Grandclaudon, accepta volontiers. Quelques jours après, nous recevions un paquet de lettres que j'affichai autour de la classe. Il fallait choisir !(2)

(2) : Comme il y avait un élève de moins à Créhen, Bernard me signalait lequel aurait deux correspondants de Saint-Didier.


Une lettre se présente parfois comme un livret. Les élèves peuvent laisser libre cours à leur imagination.


Évidement, certains correspondants, particulièrement les filles, furent très recherchés et d'autres délaissés.

Quand un seul élève de ma classe voulait un correspondant, pas de problème : il pouvait tout de suite commencer à rédiger sa réponse.

Par contre, ceux qui étaient plusieurs à vouloir le même correspondant auraient à être départagés... par le correspondant convoité lui-même. À eux de rédiger à leur tour une lettre de présentation qui leur permettrait d'être choisis. Devant une telle incertitude, certains préférèrent la prudence et prirent un des correspondants qui restaient. D'autres s'attelèrent à la tâche, pour produire la plus belle lettre possible... Ils avaient deux semaines.

Il y eut quelques désillusions pour certains quand les correspondants firent connaître leur choix. Après, l'appariement se fit très vite. La "routine" de la correspondance pouvait s'installer. Chaque enfant allait investir fortement son correspondant, sachant qu'il le recevrait pendant une semaine et qu'il vivrait chez lui une autre semaine.

Pages intérieures d'une autre lettre


D'autres pages. Toutes les lettres sont différentes. L'investissement des enfants est énorme.


Pages intérieures d'une autre lettre. Les garçons ont une présentation en général plus sobre, mais ils ne s'investissent pas moins que les filles.


La correspondance individuelle

Quand une lettre des correspondants arrive, elle est immédiatement distribuée - les enfants surveillent les grosses enveloppes quand je relève le courrier.

Après un temps de lecture, les enfants s'expriment. Certains montrent la lettre qu'ils ont reçue.

Ensuite, nous préparons la réponse. Il y a en effet un écueil à éviter, c'est que des enfants ne rabâchent la même chose dans toutes leurs lettres - cela arrivait souvent quand je laissais faire. Pour éviter cela, nous construisons collectivement un "trésor d'idées". Depuis notre dernière lettre, que s'est-il passé de nouveau dans la classe, dans l'école, à Saint-Didier, dans les environs, dans la région, en France, dans le monde ? Je trace des colonnes au tableau et je note les propositions. Les enfants copient celles qui les intéressent sur leur cahier d'essais. Ils complèteront avec ce qui leur est arrivé personnellement, les réponses aux questions posées par leur correspondant, leurs propres questions...

Ils disposent alors d'une semaine pour rédiger le brouillon, travail qu'ils peuvent effectuer en classe pendant l'expression écrite ou en travail personnel, ou à la maison. Une nouvelle semaine est accordée pour la correction et l'illustration. Je ne corrige que les brouillons qui sont déposés dans ma boîte personnelle.

Arrive le jour de l'envoi : nous vérifions qu'il y a bien toutes les lettres, que le destinataire est indiqué et qu'elles sont signées. Les élèves qui sont particulièrement fiers de leur lettre la montrent ou l'affichent au tableau - au fil du temps, la plupart le font. Puis un élève ou moi-même porte le courrier à la mairie.

La correspondance collective

La correspondance collective alterne avec la correspondance individuelle. Cette année, les thèmes ont été : l'école, la commune, les environs, Lyon. De la même façon que pour le trésor d'idées, les enfants cherchent tous les sujets possibles en accord avec le thème. Ensuite, seuls ou par deux, ils choisissent un des sujets. Quand les diverses parties ont été rédigées, un groupe élabore la lettre collective en veillant à la cohérence de l'ensemble puis la soumet à la classe.

L'accueil dans les familles

L' accueil dans les familles donne tout son sens à la correspondance, il en constitue l'achèvement. Il permet aux enfants de découvrir une autre région de l'intérieur, en quelque sorte, pas comme un touriste, et de se décentrer en découvrant qu'ailleurs, ce n'est pas comme à la maison, que la Bretagne ce n'est pas Saint-Didier avec la mer en plus.

Des relations s'établissent entre des familles qui se rencontrent, s'invitent, et c'est l'école qui a été à l'origine de tout cela.

Pour en savoir plus, voyez les pages Le cycle 3 en Bretagne, La Bretagne vue par les enfants, Palaiseau vu par les enfants.

Autres avantages

Je ne vais pas m'appesantir sur les avantages énormes qu'il y a pour les enfants à pratiquer la correspondance et l'échange scolaires : motivation, intelligence des relations entre les personnes (avec le correspondant, avec sa famille), intelligence des réalisations (les lettres et tout ce qui est produit pour les correspondants), intelligence des situations concrètes...

Je vais signaler deux avantages non négligeables pour l'enseignant. Les coûts du voyage scolaire, par rapport à un séjour en centre, sont divisés. Après les subventions accordées par le Sou de l'école publique et par la mairie, le coût de l'accueil des correspondants bretons a été réduit à 150 F par élève de Saint-Didier (visite du parc safari de Peaugres, de Saint-Étienne, ...) et le séjour d'une semaine en Bretagne a coûté 46,65 F (quarante-six francs et soixante-cinq centimes). Autant dire que le casse-tête de l'argent ne se pose plus.

L'autre avantage est que les instituteurs n'ont pas à s'occuper des enfants 24 heures sur 24. Après l'école, ces derniers sont pris en charge par les familles. Tous ceux qui sont revenus épuisés d'un séjour en centre comprendront.

Les risques

Les risques sont liés à l'accueil dans les familles. Il y a un risque objectif : la pédophilie, la maltraitance, l'alcoolisme existent. Là, il faut faire confiance à l'instituteur qui reçoit, à sa connaissance des familles. Il y a un risque subjectif : c'est la crainte que des familles s'opposent au projet en refusant de confier leur enfant à une autre. Si cela devait vraiment se produire, je suggère de poursuivre le projet sans elles ; les résultats positifs permettront de rassurer les parents au fil des années(3).

Un autre problème est lié à l'écart social. Des enfants de familles aisées peuvent se retrouver dans une famille pauvre et inversement. Je crois qu'il s'agit d'une expérience formidable et que, dans tous les cas, les enfants sont bien accueillis.

Il y a encore le problème des familles décomposées, en attendant d'être recomposées. L'expérience m'a montré que toutes les familles s'efforcent de présenter aux enfants le meilleur d'elles-mêmes et que, quand une famille a de trop grosses difficultés financières, ce sont les familles voisines qui prennent en charge les sorties le soir et le mercredi.

(3) : À Créhen, ce sont les parents qui ont appris à Bernard Grandclaudon comment pratiquer la correspondance scolaire. Le successeur de Bernard a été à son tour initié, toujours par les parents ! En 2002-2003, la classe de Créhen a échangé avec celle des Eyzies.

Et cette année 2006-2007 ?

En 2001-2002, nous avons correspondu avec une classe de Palaiseau, au sud de Paris.

En 2002-2003, une nouvelle aventure s'est déroulée avec les élèves de Chaux-des-Prés, dans les montagnes du Jura.

En 2003-2004, cela a été des rencontres formidables avec les Alsaciens de Nothalten et Blienschwiller.

Cette année, la classe compte 24 élèves et nous sommes dans l'attente de nouveaux correspondants.

Rémi Castérès

à lire aussi

Correspondance scolaire au cycle 2

Le programme en Alsace

Le programme à Saint-Didier
(document fourni aux familles)

 


Discussion


J’ai apprécié de lire une expérience de correspondance complète sur le net. Je devrais peut-être en faire autant. Je suis enseignant à Bruxelles et en 2002 j’ai vécu une expérience aussi riche entre ma classe et celle d’un collègue français du Mans. Après une année de pause (en Belgique je fais en alternance un CE2 et un CM1 et le collègue français a systématiquement un CM2) nous avons redémarré en septembre de cette année. Il serait aussi intéressant d’avoir des outils, feuille d’échange, jeu de prénoms… sur le net. J’y réfléchis : terminant un graduat en informatique en cours du soir l’an prochain, je pense faire un cédérom regroupant la théorie et les outils pratiques concernant la pédagogie Freinet. En attendant, travaillant dans une école Freinet, j’organise une concertation concernant la correspondance scolaire et votre expérience pourrait bien me servir de base d’approche.

Alain Buekenhoudt
Bruxelles

(5 novembre 2003)


Oui, je vous encourage à décrire votre expérience, le plus précisément possible. Si l'on trouve beaucoup de discours théoriques sur le net, il n'y a que peu - voire pas - de relations concrètes sur les pratiques. Écrire sur les pratiques, cela permet d'une part de formaliser sa pensée, d'autre part d'aider ceux qui ne savent pas comment s'y prendre ou qui n'osent pas se lancer.

R.C.

J'ai également fait de la correspondance dans ma classe de Vénissieux, aux Minguettes. Je n'aurais jamais pensé a faire héberger mes élèves chez les familles des correspondants. Comment organisez vous cela ? Il faut des autorisations
particulières ? Que fait le maître pendant ce temps ?

Fabien

Vénissieux

(1er juillet 2004)


J'ai longtemps habité et travaillé aux Minguettes et c'est là que j'ai commencé à réfléchir sur des démarches pédagogiques que vous retrouvez sur ce site.

Pour organiser l'hébergement dans les familles, lisez les annonces sur les sites indiqués plus haut. Vous pouvez aussi envoyer votre annonce.

Vous devinez que beaucoup de familles hésiteront à envoyer leur enfant pendant plusieurs jours aux Minguettes. Vous devez être à même d'assurer que tous les enfants y seront très bien accueillis - ce qui signifie que vous devez connaître toutes les familles et faire cela avec leur pleine participation - ce qui pourrait être un sacré projet ; j'imagine que vous pourriez y associer la municipalité de Vénissieux.

Il ne faut pas d'autorisations particulières. Votre projet de départ chez vos correspondants doit être déposé, comme les autres projets du type séjour avec nuitées hors du département d'origine, au moins huit semaines avant le départ.

Pour vous donner une idée de ce que font les maîtres, j'ai complété cette page par les programmes d'activités que nous avons eu  en Alsace et à Saint-Didier.

R.C.

Je suis une élève, mais je suis sûre que ma maîtresse serait ravie de correspondre. Je suis en cm1. Si s'est possible, merci de me contacter, je ferai mon possible pour que ce projet puisse être mis sur pied. Sinon, notre classe sans notre maîtresse pourra correspondre avec la vôtre sur le moyen de mon ordinateur (précisément celui de ma famille).

Morgane

(20 août 2004)



Ta proposition est très gentille. Je crois vraiment qu'il faut que tu proposes cela à ta maîtresse. Mais tu sais, si elle n'est pas d'accord, il faut penser que c'est beaucoup de travail pour les maîtres... et pour les enfants ! Il faut aussi comprendre que beaucoup de grandes personnes ont peur de laisser partir leurs enfants (tu as compris, n'est-ce pas, que les enfants vont passer une semaine dans les familles de leurs correspondants).

Bonne rentrée !

R.C.

J'ai été enchantée de voir une telle expérience en correspondance scolaire. Ça me préoccupe depuis longtemps, et je corresponds toujours avec la France, le Canada , les États-Unis et d'autres pays encore, en français, car je suis professeur de français en Roumanie . Nous aimerions avoir une telle expérience, bien que ce serait encore plus difficile. 

Lidia Costea

Tecuci, Roumanie

(16 octobre 2004)


 

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samedi 08 juillet 2006